Les Florettes : un collectif de freelances de l’édition, par et pour ses membres

Pouvez-vous vous présenter ?

Flore : J’ai un parcours qui s’est construit progressivement entre études littéraires et expériences pratiques dans l’édition. Très vite, je me suis investie dans de petites structures éditoriales, notamment en poésie, et j’ai multiplié les expériences en tant que bénévole dans plusieurs maisons. Mon premier emploi en tant que salariée m’a conduite à travailler dans l’édition scientifique et médicale, où j’ai rapidement pris en charge la coordination éditoriale de revues. Après un licenciement lié à la crise sanitaire, j’ai décidé de poursuivre en freelance.

Coline : J’ai toujours été passionnée par le livre et l’écrit. Après un master en édition et communication, j’ai travaillé en tant qu’assistante éditoriale dans des maisons spécialisées dans le cinéma et le théâtre. J’aimais beaucoup mon métier, mais je ressentais le besoin d’explorer d’autres horizons et d’avoir plus de liberté dans ma vie professionnelle. En parallèle de mon salariat, j’ai travaillé sur de nombreux salons du livre, ce qui m’a permis d’étoffer mon réseau. Le choix de devenir indépendante s’est donc imposé naturellement, il y a sept ans maintenant, me permettant ainsi d’exercer mes fonctions d’éditrice, de correctrice et de rédactrice.

Comment est né le collectif ?

Coline : Nous nous sommes rencontrées il y a plusieurs années grâce à Vincent Rougier, un éditeur, artiste et poète chez qui nous avons chacune effectué un stage à des périodes différentes. Nous avons découvert que nous partagions des expériences et des visions communes. Nous avons gardé contact au fil du temps, jusqu’à ce que nos chemins se croisent à nouveau.

Flore : En tant que freelance, j’ai réalisé à quel point nous étions isolées et combien il était difficile de trouver du soutien et des ressources. En 2020, enceinte et avec la nécessité de transmettre mes missions à d’autres freelances, j’ai pris conscience du manque d’organisation collective. J’ai recontacté Coline, et on a décidé de réfléchir à une structure pour rassembler les travailleuses indépendantes de l’édition.

Coline : Dans le secteur de l’édition, le freelancing est devenu courant, notamment pour les éditrices, correctrices et traductrices, souvent en raison du manque de postes salariés. Beaucoup se lancent en freelance par nécessité plutôt que par choix et doivent apprendre à naviguer, sans une préparation optimale, dans cet univers professionnel. C’est en discutant avec Flore que nous avons réalisé qu’il manquait un espace structuré pour ces professionnelles, et l’idée d’un collectif a émergé d’abord dans nos têtes, puis concrètement début 2023.

Qu’apportent Les Florettes aux indépendantes de l’édition ?

Flore : Les Florettes, c’est avant tout un espace d’échange et de soutien. Beaucoup de travailleuses indépendantes de l’édition se retrouvent isolées, sans accès à un réseau, ni aux informations clés pour mieux gérer leur(s) activité(s). En rejoignant le collectif, elles peuvent échanger avec des professionnelles qui partagent les mêmes problématiques, poser des questions et partager leurs expériences.

Coline : C’est aussi une manière de se professionnaliser et de structurer son activité. Nous avons un espace en ligne via Framateam, où les membres peuvent discuter, partager des ressources et s’entraider sur des sujets aussi variés que la gestion administrative, la tarification ou encore la recherche de missions. En matière de communication, nous publions un post Linkedin par semaine et nous envoyons une newsletter tous les deux mois environ à destination de nos membres.

Des rencontres physiques sont-elles organisées ?

Flore : Oui ! En plus des échanges en ligne, nous organisons des rencontres physiques  : les Cafés des Florettes. Ces entrevues offrent à nos membres l’opportunité de se « voir en vrai » et de discuter de leurs pratiques.

Coline : Nous encourageons vraiment les initiatives locales. Récemment, une de nos membres à Lyon, qui fait également partie de l’Association des correcteurs de langue française (l’ACLF), a organisé un événement inter-collectif ; ce qui correspond parfaitement à l’esprit que nous voulons insuffler. On se donne aussi rendez-vous sur des événements comme le Salon du livre jeunesse de Montreuil. À cette occasion, en novembre dernier, j’ai eu le plaisir de rencontrer une quinzaine de Florettes qui sont passées sur le stand où je travaillais : c’était vraiment agréable de pouvoir échanger de visu.

La question de la tarification est-elle une priorité pour le collectif ?

Flore : C’est une problématique majeure. Beaucoup de freelances ont tendance à sous-estimer la valeur de leur travail. Nous nous efforçons de leur fournir des outils pour les aider à mieux définir leurs tarifs et à expliquer aux clients les éléments qui les justifient. Dans ce cadre, nous avons conçu Le verso de vos devis, un document pédagogique destiné aux éditeurs et commanditaires, visant à mettre en évidence l’ensemble des éléments qui composent un tarif freelance.

Coline : Ce document détaille non seulement le temps passé sur le projet, mais aussi les charges fixes et variables que les travailleuses indépendantes doivent assumer : cotisations sociales, logiciels, matériel, espace de travail, formation continue, temps consacré à la prospection, et bien d’autres aspects souvent invisibles pour les clients. Cet outil est un support essentiel pour sensibiliser nos interlocutrices et leur faire comprendre qu’un tarif ne se résume pas simplement au temps passé sur une tâche. Il aide aussi les freelances à mieux valoriser leur expertise.

Quel regard portez-vous sur l’intelligence artificielle dans l’édition ?

Coline : J’ai été assez réticente au départ, mais je me rends compte qu’il est important de s’y intéresser. Aujourd’hui, j’utilise ChatGPT de manière occasionnelle, pour certaines questions liées à la rédaction. Je le considère comme un complément, un outil qui peut offrir des pistes, mais qui demande toujours une certaine vigilance. Beaucoup de Florettes sont encore en phase d’observation et se questionnent sur la manière de l’intégrer dans leur travail.

Flore : Je l’utilise peu, mais je vois que l’IA est déjà intégrée dans de nombreux outils que nous employons au quotidien. Ce qui m’intéresse surtout, c’est la question de la propriété intellectuelle et de son impact sur nos métiers. Nous envisageons de créer sur notre plateforme Framateam un canal dédié à l’IA de manière à échanger sur les usages et les risques. Et, si besoin, je pense que Swash pourra nous aider dans notre réflexion 😉

Quelles sont les perspectives pour Les Florettes ?

Flore : Nous voulons poursuivre le travail amorcé, en impliquant davantage les membres. L’idée est que chacune puisse y trouver sa place et que l’échange soit réciproque.

Coline : Et nous souhaitons surtout que le collectif reste à échelle humaine, animé par celles et ceux qui en font partie, et qu’il continue d’évoluer en fonction des besoins de ses membres.

Quelques chiffres :

• Création : janvier 2023
• 450 membres dont 125 actives
• Près de 1 800 abonnées sur LinkedIn
• 1 newsletter (irrégulière) pour les membres, contenant des informations sur le monde du freelancing et de l’édition, des offres d’emploi, des événements…

Retrouvez toutes les infos sur leur site : https://lesflorettes.fr/